A propos de l’ego

…/… Et voilà le lot de beaucoup de monde. La traversée de la vie se fera de façon plus ou moins ego-centrée avec tous les affres que cela suppose. On risque de vivre dans le faisceau étroit de conceptions guidées par un mental infirme fixé sur quelques désirs infantiles. Une vie sans autre espoir que de remplir un panier percé (c’est entre parenthèses le symbolisme du tonneau des Danaïdes). Comment rencontrer la paix avec un pareil bagage ? Et sans la paix il faudra se contenter d’éphémères consolations qui apparaîtront ici ou là sous forme de joies temporaires et relatives.

La misère humaine se cache beaucoup plus dans le clinquant et les ambitions à la mode que dans les souffrances physiques. Tels ces papillons qui se brûlent les ailes en confondant la lueur des réverbères avec la lumière du soleil, les humains s’égarent dans tous ces pièges à frustration, à souffrance et à malheur, tous ces pièges de l’ego tendus depuis l’enfance.

…/… Si la fonction d’un accompagnant, d’un guide ou d’un « cocher » est de conduire son client vers plus de bonheur, il a au moins une indication : ce n’est pas en l’aidant à satisfaire un manque de l’ego qu’il l’aidera. Bien au contraire, il renforcera la tare égotique que la personne retrouvera sous une autre forme, plus virulente que jamais, un peu plus loin sur son parcours. En « coaching essentiel », on cherchera d’abord à atténuer la virulence des désirs égotiques. Après, on verra ! Mais, en tous cas, on engagera un travail en ce sens, un travail de fond et constant. Un travail d’usure, en quelque sorte. Même s’il est ambitieux d’envisager de se débarrasser entièrement de l’ego et d’atteindre la grande Paix et le bonheur de l’Eveil, c’est quand même dans cette direction qu’on s’en approchera progressivement. Si on n’attaque pas les souffrances à leur source, il est vain de vouloir les éteindre durablement avec de la poudre de perlimpinpin

…/… Il est vrai que la perfection humaine est surtout théorique. Cependant on ne peut pas affirmer qu’elle soit rigoureusement impossible. On peut, peut-être, la situer au niveau de Jésus, de Bouddha ou d’autres qui, sans doute, l’ont vécu ou tout au moins approché de très près. De toute façon, vu d’en bas, on n’est pas qualifié pour se prononcer avec autorité. On ne peut qu’envisager l’idéal d’une certaine façon. Une façon purement intuitive, c’est à dire par une descente de la vérité au niveau de la pensée et non pas par une remontée du raisonnement prétendant atteindre la vérité par déduction logique[1].

En tout état de cause, c’est connaître la direction qui est important. Même si l’extinction totale de l’ego est une ambition voisine de l’utopie, il n’en reste pas moins que tout apaisement est bienvenu. Cependant il y a là précisément un point fondamental en « coaching essentiel », un point de vue qui devrait au moins permettre de ne pas se tromper d’ennemi. Les moyens à mettre en œuvre pour aider quelqu’un à sortir d’une souffrance ou à s’épanouir peuvent être multiples et variés, plus ou moins efficaces ou adaptés, mais l’accompagnant doit viser à la racine du mal : l’ego.

Combien d’erreurs sont commises pour l’avoir oublié ! Combien d’accompagnants aident leurs clients à « dépasser » une souffrance par de savantes gymnastiques qui consistent à la leur faire oublier, mais qui laissent bien tranquille le loup dans la bergerie. Que dire de toutes les techniques médicales ou autres qui visent seulement à anesthésier les pulsions ? Et que penser de ces approches qui prônent la pensée « positive » à outrance du style : « Je suis le plus beau, je suis le plus fort ! », dont l’effet évident ne peut être qu’un puissant renforcement des tares égotiques. Tout cela ne peut être que reculer pour mieux sauter en légitimant cette faim de loup prête à dévorer nos entrailles. Véritables bombes à retardement dont on gonfle la puissance…


[1] Ce sujet mériterait évidemment de plus amples développements, cependant, si nous citons cet aspect des choses en passant, c’est que notre époque fondée quasiment exclusivement sur le raisonnement, perd de vue la validité de l’intuition.

…/… Tout individu, homme ou femme, qui a atteint une certaine maîtrise est forcément quelqu’un de gentil et de doux, un être humble et empli de compassion. C’est aussi quelqu’un généralement gai et joyeux qui a su ouvrir ses yeux aux multiples beautés de l’existence. C’est évidemment quelqu’un sans enfantillages intempestifs, donc quelqu’un de serein trouvant dans ce qu’il a, une source suffisante de satisfactions. Dans l’adversité, c’est quelqu’un qui saura trouver suffisamment de courage et de ressources pour y faire face sans larmoyer et sans faiblir. Ce n’est qu’à partir de ce stade qu’il pourra déployer une ouverture de son intelligence et de sa conscience vers ce fabuleux destin réservé aux hommes.