Extraits à propos de notre civilisation

…/… En effet, une des premières choses à considérer est le milieu dans lequel nous évoluons avec un regard suffisamment distant pour en tirer quelques paramètres essentiels dont l’influence est partout. Quiconque prétend accompagner les autres, se doit de prendre un certain recul vis à vis des évènements particuliers afin de les inclure dans un mouvement plus vaste qu’il est indispensable de prendre en compte. A propos des actions à courte vue, on dit que : « Donner de la nourriture à quelqu’un lui permet de manger un jour, lui forger une charrue lui permet de manger toujours ».

Il est entendu que pour ce sujet comme pour la plupart de ceux qui seront abordés dans cet ouvrage, nous devrons nous contenter de brefs aperçus pour ne pas nous écarter du cadre de notre étude. Nous mettrons simplement quelques éclairages sur des points essentiels à la compréhension de ce que comptons exposer. Il va de soi que de plus amples développements pourront se faire en d’autres circonstances.

Sans prétendre prophétiser sur quoi que ce soit, nous nous en tiendrons à de simples observations et à un peu de logique.

…/… Depuis des millénaires la notion de progrès anime les actions humaines. Depuis l’invention de la roue, cette notion a entraîné l’humanité vers une quantité croissante d’objets de plus en plus perfectionnés censés apporter plus de bonheur. Il semblerait à première vue que cette course poursuite n’ait pas tellement atténué les sources majeures de souffrance. La peur, la frustration, la honte, la jalousie et tant d’autres nuisances internes taraudent les tripes de nos contemporains au moins autant que du temps de l’homme de Cro-Magnon. Quant à la souffrance physique, il semblerait qu’on la supporte de plus en plus difficilement. Il suffit pour s’en faire une idée de comparer les réactions d’un animal quelconque à celles d’un quelconque quidam s’ils sont blessés physiquement de façon équivalente.

Même si cette évidence a traversé les générations, et malgré les multiples voix qui se sont élevées au cours de l’histoire des hommes, une immense lame de fond a entraîné les civilisations successives vers de plus en plus de la même chose. Les sages en petit nombre par rapport aux autres meurent à tour de rôle avec leur sagesse. Quant à la foule, elle poursuit inexorablement son idée préconçue selon laquelle on sera plus heureux grâce au progrès matériel. Ceux qui naissent sont immédiatement emportés par la vague déferlante des us et coutumes de leurs prédécesseurs.

C’est ainsi qu’en toute logique, cet engouement permanent vers le progrès ne pouvait qu’entraîner une croissance exponentielle des techniques, des inventions et des objets de plus en plus sophistiqués. Cet envahissement ne pouvait que faire passer au premier plan des pensées humaines ce qui était le plus présent dans leur vie, les découvertes et nouveautés. Les sciences sont devenues pour la majorité le repère essentiel. Il est curieux de constater à quel point on fait confiance aux sciences et au progrès, alors qu’avec un peu de recul on pourrait quand même se demander s’il n’y aurait pas une source de bonheur plus fiable que cela. Une source à laquelle il serait peut-être préférable de faire confiance. Ce point de vue est celui qui devrait venir naturellement à l’esprit quand on se désespère de voir que ce sur quoi on comptait n’a non seulement pas tenu ses promesses, mais, plus encore, n’a fait que creuser le vide essentiel, augmenter la détresse individuelle.

L’augmentation exponentielle en quantité et en rapidité des fruits semés par nos ancêtres, ne peut que se diriger vers un paroxysme devenant de plus en plus insupportable si l’on consent à admettre que la source du bonheur est ailleurs. A l’évidence ce n’est pas que le progrès soit source de malheur, mais s’il envahit tout l’espace des pensées et préoccupations d’une civilisation, il prend autorité et domine tout. Du coup, les valeurs se trouvent inversés par rapport à ce qu’elles devraient être, si, bien entendu, on accepte l’idée que l’orientation d’une vie devrait être d’aller vers plus de bonheur.

En effet si ce sont les valeurs qui n’apportent pas le bonheur qui prédominent, elles étouffent et font perdre de vue celles qui pourraient l’apporter. L’urgence croissante de satisfaire les premières fait oublier les secondes, ce qui creuse un écart de plus en plus insupportable. Le monde s’étourdit dans d’éphémères satisfactions qui en demandent sans cesse d’autres, de plus en plus nombreuses et de plus en plus vite, dans une sorte d’affolement croissant. Comme le « progrès » se développe sur une exponentielle et comme il est devenu abusivement le repère dominant du bien-être, il arrive un moment où disparaissent d’une société les principes de simple bon sens et où elle sombre dans la folie. Folie que cette société au fil des générations, a fini par considérer comme une fatalité. Nous en sommes là !

Or, les principes du bonheur de l’homme sont immuables et éternels, et ce n’est pas la course folle d’une civilisation qui les changera. On ne peut raisonnablement que supposer qu’il viendra un temps ou un paroxysme inévitable entraînera un renversement vers un nouvel équilibre. Un nouvel équilibre où l’ordre naturel des choses reprendra ses droits et où les valeurs humaines retrouveront la hiérarchie ou l’ordre d’importance qui est logiquement le leur.

…/… Cependant, il ne s’agit pas ici de se faire une vision pessimiste de notre condition. Ce serait même le contraire. En effet, s’il est inévitable qu’il se produise un changement de civilisation à plus ou moins brève échéance, ce qui est vrai pour l’ensemble de la société ne l’est pas pour un individu en particulier. Dans la société telle qu’elle est, on peut tout aussi bien rencontrer le bonheur qu’il y a dix mille ans. Les principes qui y mènent sont toujours les mêmes. Ces principes naturels sont enfouis au fond de notre être depuis l’enfance.

L’enfant petit connaît l’émerveillement et la contemplation. Mais, progressivement il modifiera cet « état primordial » et le remplacera par des joies de plus en plus banales pour lui, et en grandissant, il deviendra souvent un adulte gris triste qui recherche une accumulation de conditions pour forcer en quantité ce qu’il a perdu en qualité. L’enfant s’émerveille du cheminement d’une fourmi sur un caillou, il y voit encore un prodige de conditions qu’il ne détaille pas mais qu’il reçoit dans un ensemble parfait.

Ainsi unifié au prodige global de la création en perpétuelle offrande il connaît le bonheur. Son incapacité à en comprendre les détails le protège de la perdition. Mais cela ne durera pas bien longtemps. Il sera très vite happé par la tendance analyste de ses congénères qui l’entraîneront inexorablement vers des points de vue de plus en plus restreints en raison directe avec leur quantité croissante. Un foisonnement de considérations étriquées par des œillères de spécialistes, bien séparés et cloisonnés les uns des autres, éteint l’éclairage du vivant qui traverse tous les êtres, et qui donne au monde sa cohérence.

…/… Nous ne pouvons passer sous silence dans ce chapitre consacré à notre civilisation des éléments qui devraient sauter aux yeux de tout le monde. La torpeur ambiante de la foule semble s’approfondir en raison directe de l’évidence de l’urgence qu’il y aurait à se réveiller. C’est pourquoi, je ne m’exprime ici que pour quelques-uns uns, je ne me fais aucune illusion vis à vis de ceux qui trouveront toujours de multiples esquives pour ne pas voir.

Ceux qui peuvent voir le plus clairement, ce sont les enfants (les vrais !). Cette affirmation n’étonnera que ceux qui ont complètement perdu ce regard d’enfant, à la fois connaissant sur un plan et ignorant sur un autre.

En général, les enfants entrent dans le monde en modélisant leurs parents, en s’adaptant au milieu, en rêvant de devenir adulte et en s’intégrant progressivement dans une société qui les accueille. Il serait logique que la société de leurs parents leur ait préparé de quoi grandir, s’épanouir et être plus heureux que leurs aînés. A quoi assiste-t-on aujourd’hui ? Une vague de plus en plus importante d’enfants se tourne vers la drogue. Pourquoi ?

Nous n’allons pas enfoncer des portes déjà ouvertes par toutes sortes de moralisateurs, et encore moins nous aligner sur les allégations de ces chasseurs de coupables qui courent les rues et les écrans de télévision. Nous nous en tiendrons à un simple constat. Les faits sont là, aujourd’hui plus que jamais, beaucoup de ceux qui arrivent dans ce monde semblent vouloir s’en détourner. Ressembler à ces adultes ? Où sont les modèles ? – Faire des projets ? Lesquels ? – Trouver de l’enthousiasme ? Où çà ? Quand la sève monte et qu’elle ne rencontre que de la fumée, quel printemps a envie de fleurir ? Beaucoup s’y perdent.

…/… Ces enfants auraient-ils raison ? Y verraient-ils plus clair sans le comprendre ? Mais ils sont sans moyens, leurs conflits internes sont inconscients et ils ne sont pas en mesure de les justifier. Leur lucidité native qui attendrait d’être guidée et orientée dans les voies de l’ordre naturel est bafouée et rejetée de façon insidieuse par une ambiance à contre courant. Du coup, coincés dans des pulsions contradictoires ils se cherchent une thérapie que la société ne leur offre pas. Ils ont recours alors à l’auto thérapie. Ils cherchent instinctivement à l’intérieur ce qui ne se trouve pas à l’extérieur. Or, de façon ancestrale, la thérapie s’entend par l’utilisation des plantes. Il n’y a pas lieu de s’étonner que ces enfants se tournent vers l’auto médication par les plantes. L’alcool (lui aussi issu des plantes) fut utilisé depuis bien longtemps pour compenser le mal de vivre, aujourd’hui ce sont des drogues diverses. Les pharmaciens et les trafiquants s’enrichissent.

La société irresponsable laisse ses enfants seuls se débrouiller en auto thérapie et auto médication. Bien au contraire elle les culpabilise, ce qui ne peut que renfoncer encore plus cette exclusion. Les parents sont pieds et poings liés, ils assistent impuissants à ce rejet de leurs enfants, un rejet qui a la force de l’énergie du désespoir. Certains jeunes se rassemblent par petits groupes pour essayer d’exister dans une micro société marginalisée entre gens qui se comprennent intuitivement. A des degrés divers, la drogue devient pour eux le seul thérapeute qui va là où ça fait mal et qui apaise temporairement comme le ferait une mère qui endort son enfant.

Malheureusement pour eux, ce n’est pas une mère, la drogue est aveugle et n’a pas la bienveillance d’une mère. Il n’y a rien qui veille pour accompagner leur sommeil, et les ouvertures psychiques sont laissées au gré des synchronisations conformes à leur état malade et déséquilibré. Il n’est pas étonnant qu’elles ne rencontrent que des éléments psychiques propre à renforcer encore ce à quoi on voudrait échapper. C’est ainsi que le système se mord la queue.

…/… Nos enfants, cela regarde tout le monde ! Il est une multitude d’enfants perdus, et beaucoup habitent déjà un corps d’adulte. Même si cet écrit reste un coup d’épée dans l’eau, tant pis. Mais peut-être aussi, il donnera à ceux qui pensent de cette façon l’idée de rassembler leur courage. Ce dernier mot semble avoir disparu de notre langue (sans doute pour un temps seulement). Pourtant c’est du courage de leurs aînés dont nos enfants ont besoin. Courage de se remettre en cause, et surtout celui de remettre en cause des montagnes d’a priori et de fanatisme autour de la sacro-sainte religion des professeurs Nimbus. Il va bien falloir à un moment donné que l’erreur rencontre son apogée et s’effondre. D’ailleurs, ce sujet n’en est qu’un parmi tant d’autres. Mais enfin, tout homme ou toute femme responsable ne peut pas se laisser endormir indéfiniment et rester figé dans des comportements qui manifestement ne marchent pas. Chacun s’abrite derrière l’impossibilité de faire autrement. Tout est verrouillé, tout dépend de dirigeants qui dirigent surtout leur carrière triomphale.

C’est à nos enfants de prendre la parole. Oh! Non pas avec de savantes gymnastiques verbales dont raffolent les fanatiques télévisio-hypnotisés, mais par le langage muet de leur détresse. Il suffit de les voir faire. Compagnons de chaînes ils s’échangent un joint à l’insu de tous. Ils ont souvent la fraternité des prisonniers de guerre derrière des barbelés surveillés par les adultes gardes-chiourme. Ce ne sont pas les conseils « éclairés » de ceux qui ne font rien pour eux qui vont les décider à changer de thérapie. Et puis, quelle thérapie ? Celle des médecins prescripteurs de médicaments qui comptent sur l’effet des principes actifs ? Manifestement, ça ne marche pas. La plupart ont essayé.

Alors on peut rêver et anticiper ce qu’un jour ou l’autre il faudra bien envisager. Si, d’aventure, les valeurs reprennent pour un certain nombre leur hiérarchie naturelle, ce nombre là rencontrera l’évidence de laisser tomber les activités accessoires au profit des activités essentielles. L’accompagnement des jeunes passe avant tout le reste. Il ne manque pas de gens compétents, intelligents et bienveillants pour s’en charger.

…/… Je sais qu’il faut un sacré mérite pour se décider à abandonner le flonflon des habitudes. On préfère souvent attendre de n’avoir plus rien à perdre. Mais beaucoup de nos enfants sont déjà dans cette position, et c’est précisément ce qui rend les communications difficiles. D’un côté il y a ceux qui n’ont rien à perdre, de l’autre ceux qui veulent préserver leurs points de vue et leur statut. Parmi ces derniers il en est de bonne foi, certes, ils font de leur mieux sans oser ou pouvoir bouger, et puis il en est d’autres qui, ceux là, ont d’autres intérêts et maintiennent l’ordre social qui les a promus.

Nos enfants bâillonnés hurlent silencieusement qu’on se trompe. Il faudra retrouver un semblant de bon sens, faire confiance à ce qui est digne de confiance et à ne plus faire confiance à un système en voie de disparition. Nous avons à les accompagner avec les valeurs essentielles, à les guérir de ce mal de vivre que notre civilisation n’a pas su prévenir, à les préparer de notre mieux pour qu’à leur tour ils accompagnent les plus jeunes bien mieux que n’avons su le faire. Ce sont les pionniers du monde futur. Si quelque chose de bon doit sortir de cette génération, il faut bien que ça y soit déjà.

…/… Notre monde est en mutation. Autant prendre les choses comme elles sont. Nous vivons une époque charnière entre deux civilisations. C’est pourquoi, il vaut mieux ne pas trop se braquer sur tel ou tel travers. Nous n’en finirions plus et nos vies ne seraient qu’un amoncellement de râleries ou de railleries stériles. Tout en supportant, encore pour un temps les dernières bourrasques, il y a déjà beaucoup mieux à faire.

L’heure n’est plus à se coucher et à attendre. Il est temps de s’impliquer. Le monde futur ne sera pas un simple prolongement de celui-ci, il sera fondamentalement différent. Il est temps pour quelques-uns uns de retrouver leur discernement et de commencer à préparer pour les plus jeunes de quoi rencontrer ce qu’il y a de réellement magnifique dans l’être humain.

En accompagnement essentiel, il s’agira tout d’abord d’aider les uns et les autres à accepter avec philosophie les trépidations et gesticulations du monde d’aujourd’hui, de façon à gérer avec recul et sagesse l’inévitable. D’autre part, il s’agira de générer un certain enthousiasme pour participer à cette vie avec une « mission » digne de ce nom. Chacun à son niveau et dans son milieu, peut se consacrer à sa propre raison d’être, appuyé sur des valeurs fondamentales.

Nombreux sont aujourd’hui celles et ceux qui intuitivement voudraient se consacrer aux autres. Le coaching n’est pas une vulgaire mode. C’est une réponse de l’ordre naturel au besoin croissant d’accompagnement. Beaucoup d’hommes et de femmes, pleins de générosité, s’orientent dans cette direction, surtout elles et en plus grand nombre que les hommes, ce qui s’ajoute à d’autres présomptions qui laissent entrevoir que les femmes vont sans doute avoir un grand rôle à jouer dans un futur proche.

Le coaching essentiel s’est aussi donné pour mission d’accompagner et de former dans leur noble orientation, celles et ceux qui accompagnent ou veulent accompagner les autres.