Reflets

 

L’objectif de cet article est de poser un prélude aux diverses études concernant la condition humaine. Un prélude sous forme d’une analyse complexe, certes, mais une analyse destinée à orienter la conscience sur des choses très simples à réaliser. Ce ne sont que quelques pistes de réflexion héritées des lumières, accessibles à tous, du patrimoine de l’humanité. Il y en a bien d’autres, c’est à chacun d’organiser son parcours selon ses propres sensibilités. L’objectif visé par ce prélude est bien d’apporter de quoi faciliter et réaliser des conceptions telles que « l’âme soeur », « la raison d’être » et bien d’autres aspects de l’amour et de l’action. On peut traverser l’existence de diverses façons ; quelles que ce soient les circonstances présentes, on peut toujours décider de construire sa vie pas à pas, tel un chef d’oeuvre.

 

 

Le principe universel de toutes les traditions authentiques est de concevoir l’univers manifesté par l’expression « l’unité dans la multiplicité ». Le mot « univers », du latin uni-versus (vers le un), indique que la totalité des éléments, apparemment distincts, qui constituent l’univers sont individuellement des « reflets » du Un.

 

Quand on se regarde à la glace, l’image dans le miroir est un reflet que l’on peut voir, et ce reflet permet de prendre conscience de sa source (son visage) qu’on ne peut pas voir directement. Le reflet est illusoire par lui-même, mais il permet de prendre conscience de sa source invisible. C’est ainsi que mon reflet dans la glace est tourné vers le un qui, en l’occurrence est mon visage. Dit autrement, mon reflet est symbole de mon véritable visage.

 

 

Or mon véritable visage est lui-même l’un des multiples reflets de ce que je suis actuellement, et ce que je suis actuellement est à son tour l’un des multiples reflets de l’espèce à laquelle j’appartiens et ainsi de suite. De proche en proche, en remontant de reflets en reflets, du détail vers le global, je peut comprendre que le « je suis » individuel est un reflet provisoire du « Je Suis » universel. Ma petite conscience individuelle est un aspect distancié par reflet, de la Conscience Universelle. En d’autres termes, j’exprime à ma façon le divin, ou de façon plus exacte, c’est le divin qui s’exprime aussi par moi. Il s’exprime par moi comme il s’exprime dans tous les êtres, chacun selon son degré individuel de conscience.

 

 

Il y a ici deux difficultés de compréhension qui découlent du fait que notre entendement privilégie le monde physique :

 

1/ On a beaucoup de mal à admettre que l’aspect solide et matériel d’un être puisse être le reflet de ce qu’il est de façon immatérielle. Vu depuis le monde physique, on a l’illusion que la cause est dans la matière et l’effet (par reflet) dans l’immatériel.

 

2/ On débouche à partir de ce qui précède sur une autre difficulté qui est d’intégrer un principe de la loi de l’analogie universelle. La correspondance entre l’aspect matériel d’un être et son aspect immatériel est une analogie par effet miroir, c’est à dire en mode inversé. Je rappelle que psyché signifie miroir. Un reflet dans la glace est immatériel par rapport à ce qu’il reflète qui, lui, est matériel ; dans ce cas précis, la source est matérielle donc le reflet est immatériel. C’est l’inverse si la source est immatérielle. Par exemple ce qui est le plus grand sur un plan, apparaît comme le plus petit sur l’autre (cf. cette présentation symbolique de l’Etre suprême dans la chrétienté ou dans l’Islam qui apparaît dans le monde matériel aussi petit qu’un grain de sénevé ou de moutarde).

 

 

Je suis l’un des aspects du cosmos (du grec kosmos = le monde ordonné), monde ordonné par la logique du déploiement par reflets successifs du Un. Par voie de conséquence, cette extériorisation du Un ne peut se manifester que par des reflets qui sont « un » eux-mêmes, c’est-à-dire uniques et in-reproductibles, ne pouvant se manifester qu’une fois.

 

 

Il y a ici une autre remarque à faire : le déploiement se fait de façon prismatique par décomposition en des modalités constitutives de l’ensemble ; par exemple, la décomposition de la lumière en de multiples couleurs dont chacune d’entre elles est à la fois unique et indispensable à l’ensemble. Chaque couleur contient en essence le blanc dont elle procède, même si individuellement elle n’exprime que l’un de ses aspects. Le point de vue humain, vu d’en bas, est quantitatif et dira le blanc est la somme de toutes les couleurs ; le point de vue métaphysique, vu d’en haut, est qualitatif et dira toutes les couleurs sont des reflets individuellement qualifiés sur l’une ou l’autre des modalités du blanc.

 

 

Ceci nous conduit à considérer que chacun d’entre nous est l’un des reflets qualifié du UN, à la fois unique et indispensable à l’ensemble. C’est ainsi que la vision d’en bas qui voit les choses de façon quantitative et qui fait que je me considère comme infinitésimal et inutile à l’univers, est en totale contradiction avec la vision d’en haut qui me considère comme l’un des aspects du divin à la fois unique et indispensable, provisoirement qualifié par mon degré de conscience tel que je suis actuellement.

 

 

Ici et maintenant, j’actualise l’état humain dans ce monde soumis à l’espace/temps. C’est là une qualification globale de ce que je suis et de ma raison d’être. Dans cet état je suis un « un » relatif, une unité sous multiple du Un absolu. A ce titre, je dispose à mon niveau du même principe « d’unité dans la multiplicité » que le Un absolu dont mon individualité provisoire procède. Je suis un univers, relatif certes, mais un univers par reflet de l’Univers absolu ; un univers qui dispose donc du même potentiel dans le relatif que l’Univers dans l’absolu. Fils du père en est une représentation si l’on considère qu’un fils dispose des mêmes qualifications que le père. « Dieu fit l’homme à son image » en est une autre représentation.

 

 

En ma qualité de un (provisoire et relatif), je suis à la source d’une multitude de reflets. Mon « je suis » s’exprime diversement le plus souvent à mon insu. Pour me permettre de le réaliser quelque peu, je me rends bien compte que je suis différent selon les circonstances. Quand je suis avec un de mes amis, je suis différent de ce que je suis avec quelqu’un d’autre. Tout se passe comme si je changeais d’identité selon les circonstances. Je m’installe chaque fois dans l’un ou l’autre de mes reflets potentiels pour actualiser provisoirement un personnage particulier.

 

 

C’est ainsi qu’un mécanisme plus ou moins inconscient me fait actualiser par voie de réaction complémentaire l’un des aspects potentiels de mon identité unique. Mais cet aspect nouvellement actualisé est unique à son tour ; il ne concerne que cette relation (avec une personne particulière, par exemple). Il s’ensuit que toute relation entre deux personnes est obligatoirement unique. Même s’il peut y avoir des ressemblances avec d’autres relations avec d’autres personnes, chaque relation est forcément une configuration unique.

 

Qui plus est, les réactions complémentaires de part et d’autre se sont configurées à partir de l’un ou l’autre des multiples reflets que chacun peut produire. Comme la sélection de tel ou tel aspect de l’autre ne saurait être aléatoire, tout dépend de ce que mon « regard » est disposé à voir à ce moment précis (ceci, bien sûr de façon majoritairement inconsciente). La qualité d’une relation dépend des aspects respectifs qui ont trouvé à se synchroniser. C’est ce qui fait que tantôt nous aimons ou tantôt nous n’aimons pas tel ou tel aspect d’une personne selon les critères individuels qui nous sont familiers. Ceci est un autre sujet que nous ne développerons pas ici ; nous dirons simplement en passant que ces critères sont en majorité liés à des associations d’idées d’ordre psychologique.

 

Les synchronisations ne mettent en résonance (pour le meilleur ou pour le pire) que certains des multiples aspects de chacun, mais il y aurait bien d’autres qui seraient possibles. C’est ce qui fait que dans la mouvance, les synchronisations peuvent se déplacer et changer la nature d’une relation.

 

 

Nous voyons bien, maintenant, la confirmation de ce que les sages de tous les temps ont exprimé de façon diverses, tout n’est qu’illusion. Notre mental « réfléchit » car il manœuvre dans des reflets. Quant à nos pulsions, ce ne sont que réflexes conditionnés fondés sur des peurs illusoires qui résultent d’une sévère myopie intellectuelle. En effet, si l’existence nous apparaît comme le Tout, la mort est un épouvantail ; on comprends dès lors ce système réflexe de défense qu’on appelle l’ego.

 

 

Cependant, si l’erreur masque la réalité, elle ne la supprime pas. Même si à partir de nos différents reflets et de nos diverses personnalités, nous traversons la vie avec des masques (persona en latin = masque), il n’en reste pas moins que notre réalité profonde est toujours là. Même si nous avons du mal à nous connecter à un état de conscience supérieur unifié à l’univers (ou à son Principe divin), à percevoir ce sentiment océanique que les orientaux appellent le « sentiment d’éternité », il n’en reste pas moins que, par nature, il est accessible à tous, ne serait-ce que par bribes intermittentes. La condition humaine se déploie dans l’illusion certes, mais pour celles et ceux qui le savent et ne sombrent pas dans la confusion, c’est aussi grâce à cette configuration que nous pouvons éveiller notre conscience à la splendeur de l’univers.

 

 

Tout est miroir, tout nous renseigne et nous enseigne chaque jour un peu plus. Notre psyché (miroir de l’âme) permet ce prodige. On avance, on trébuche, on se trompe, mais on rectifie et on continue. Bien souvent on tombe sur l’illusion des illusions. C’est lorsqu’on prend un instant d’exception proche du sentiment d’éternité pour une illusion, alors que, justement, il s’agissait d’un moment les plus précieux de notre vie ; un moment de conscience universelle que nous avons ensuite refoulé.

 

 

Tout ce qui appartient a l’illusion est voué à disparaître, à se dissoudre sans trace, tel un éclair. Que peut-il rester de nos vies dans ce qui ne fut qu’illusoire ? Rien évidemment. Par contre, ces instants précieux que nous devrions privilégier, ils s’inscrivent, eux, dans notre réalité universelle. De ce fait ils sont des marches de Connaissance qui éveillent notre « je suis » vers la splendeur du « JE SUIS » universel. Quand notre substance provisoire avec tout les aspects qu’elle permet sert de socle pour en « deviner » notre propre essence, on se conforme à notre fabuleuse « Raison d’être ». Divin et deviner ont la même étymologie, c’est dire que le divin se devine au travers des apparences. Quand c’est l’inverse et que notre substance s’acharne à subsister, on est en conflit avec notre « Raison d’être », un combat perdu d’avance.

 

 

L’Amour est le moyen qui nous est donné pour éveiller notre âme. Tout ce qui est attachement est lié à l’éphémère, il n’en restera rien. C’est l’affect qui est un reflet inférieur et illusoire de l’amour. Par contre, quand l’Amour éveille des phases de total détachement, et par suite de libération (même fugitive) de l’ego, cela s’inscrit au delà du temps et de l’espace dans l’universalité de l’être, dans un éternel présent. Instants impérissables qui ouvrent une brèche définitive dans l’opacité de notre entendement  !

 

 

Quand deux êtres, pour des raisons qui leur échappent, ont rencontré ensemble un espace privilégié où ils ont perçu quelques reflets d’infinitude, c’est qu’ils ont synchronisé des reflets d’ordre supérieur, l’un grâce à l’autre. Chacun a éveillé son regard, le rendant ainsi capable de percevoir les reflets supérieur de l’autre. Par une sorte d’entraînement mutuel, ils se sont élevés ensemble sur une conscience inhabituelle. Une impression de « perdre la tête » qui n’est autre que de perdre le mental et par suite l’ego. Cela n’a peut-être pas duré en raison d’un hostilité du milieu corporel qui perçoit l’universalité comme un néant (ce qui d’ailleurs est logique au niveau de la substance). En effet, on peut saccager l’essentiel et jeter un diamant dans la boue. Cependant, le diamant n’est jamais altéré et donc ils conservent à tout jamais une porte d’accès pour à nouveau accepter de « perdre la tête » et lui substituer « l’intelligence du cœur ». Que ce soit ensemble en retrouvant cet espace privilégié, ce sanctuaire sacré et secret posé dans l’infinitude au creux d’une plume d’ange, ou que ce soit sous d’autres horizons ; un sanctuaire déploie par réfraction de multiples reflets.

 

 

Le fou est censé avoir perdu la tête. Alors, soyons fous !

 

 

H.Arnaudy 2013

 

 

Reflets

 

 

L’objectif de cet article est de poser un prélude aux diverses études concernant la condition humaine. Un prélude sous forme d’une analyse complexe, certes, mais une analyse destinée à orienter la conscience sur des choses très simples à réaliser. Ce ne sont que quelques pistes de réflexion héritées des lumières, accessibles à tous, du patrimoine de l’humanité. Il y en a bien d’autres, c’est à chacun d’organiser son parcours selon ses propres sensibilités. L’objectif visé par ce prélude est bien d’apporter de quoi faciliter et réaliser des conceptions telles que « l’âme soeur », « la raison d’être » et bien d’autres aspects de l’amour et de l’action. On peut traverser l’existence de diverses façons ; quelles que ce soient les circonstances présentes, on peut toujours décider de construire sa vie pas à pas, tel un chef d’oeuvre.

 

 

Le principe universel de toutes les traditions authentiques est de concevoir l’univers manifesté par l’expression « l’unité dans la multiplicité ». Le mot « univers », du latin uni-versus (vers le un), indique que la totalité des éléments, apparemment distincts, qui constituent l’univers sont individuellement des « reflets » du Un.

 

Quand on se regarde à la glace, l’image dans le miroir est un reflet que l’on peut voir, et ce reflet permet de prendre conscience de sa source (son visage) qu’on ne peut pas voir directement. Le reflet est illusoire par lui-même, mais il permet de prendre conscience de sa source invisible. C’est ainsi que mon reflet dans la glace est tourné vers le un qui, en l’occurrence est mon visage. Dit autrement, mon reflet est symbole de mon véritable visage.

 

 

Or mon véritable visage est lui-même l’un des multiples reflets de ce que je suis actuellement, et ce que je suis actuellement est à son tour l’un des multiples reflets de l’espèce à laquelle j’appartiens et ainsi de suite. De proche en proche, en remontant de reflets en reflets, du détail vers le global, je peut comprendre que le « je suis » individuel est un reflet provisoire du « Je Suis » universel. Ma petite conscience individuelle est un aspect distancié par reflet, de la Conscience Universelle. En d’autres termes, j’exprime à ma façon le divin, ou de façon plus exacte, c’est le divin qui s’exprime aussi par moi. Il s’exprime par moi comme il s’exprime dans tous les êtres, chacun selon son degré individuel de conscience.

 

 

Il y a ici deux difficultés de compréhension qui découlent du fait que notre entendement privilégie le monde physique :

 

1/ On a beaucoup de mal à admettre que l’aspect solide et matériel d’un être puisse être le reflet de ce qu’il est de façon immatérielle. Vu depuis le monde physique, on a l’illusion que la cause est dans la matière et l’effet (par reflet) dans l’immatériel.

 

2/ On débouche à partir de ce qui précède sur une autre difficulté qui est d’intégrer un principe de la loi de l’analogie universelle. La correspondance entre l’aspect matériel d’un être et son aspect immatériel est une analogie par effet miroir, c’est à dire en mode inversé. Je rappelle que psyché signifie miroir. Un reflet dans la glace est immatériel par rapport à ce qu’il reflète qui, lui, est matériel ; dans ce cas précis, la source est matérielle donc le reflet est immatériel. C’est l’inverse si la source est immatérielle. Par exemple ce qui est le plus grand sur un plan, apparaît comme le plus petit sur l’autre (cf. cette présentation symbolique de l’Etre suprême dans la chrétienté ou dans l’Islam qui apparaît dans le monde matériel aussi petit qu’un grain de sénevé ou de moutarde).

 

 

Je suis l’un des aspects du cosmos (du grec kosmos = le monde ordonné), monde ordonné par la logique du déploiement par reflets successifs du Un. Par voie de conséquence, cette extériorisation du Un ne peut se manifester que par des reflets qui sont « un » eux-mêmes, c’est-à-dire uniques et in-reproductibles, ne pouvant se manifester qu’une fois.

 

 

Il y a ici une autre remarque à faire : le déploiement se fait de façon prismatique par décomposition en des modalités constitutives de l’ensemble ; par exemple, la décomposition de la lumière en de multiples couleurs dont chacune d’entre elles est à la fois unique et indispensable à l’ensemble. Chaque couleur contient en essence le blanc dont elle procède, même si individuellement elle n’exprime que l’un de ses aspects. Le point de vue humain, vu d’en bas, est quantitatif et dira le blanc est la somme de toutes les couleurs ; le point de vue métaphysique, vu d’en haut, est qualitatif et dira toutes les couleurs sont des reflets individuellement qualifiés sur l’une ou l’autre des modalités du blanc.

 

 

Ceci nous conduit à considérer que chacun d’entre nous est l’un des reflets qualifié du UN, à la fois unique et indispensable à l’ensemble. C’est ainsi que la vision d’en bas qui voit les choses de façon quantitative et qui fait que je me considère comme infinitésimal et inutile à l’univers, est en totale contradiction avec la vision d’en haut qui me considère comme l’un des aspects du divin à la fois unique et indispensable, provisoirement qualifié par mon degré de conscience tel que je suis actuellement.

 

 

Ici et maintenant, j’actualise l’état humain dans ce monde soumis à l’espace/temps. C’est là une qualification globale de ce que je suis et de ma raison d’être. Dans cet état je un « un » relatif, une unité sous multiple du Un absolu. A ce titre, je dispose à mon niveau du même principe « d’unité dans la multiplicité » que le Un absolu dont mon individualité provisoire procède. Je suis un univers, relatif certes, mais un univers par reflet de l’Univers absolu ; un univers qui dispose donc du même potentiel dans le relatif que l’Univers dans l’absolu. Fils du père en est une représentation si l’on considère qu’un fils dispose des mêmes qualifications que le père. « Dieu fit l’homme à son image » en est une autre représentation.

 

 

En ma qualité de un (provisoire et relatif), je suis à la source d’une multitude de reflets. Mon « je suis » s’exprime diversement le plus souvent à mon insu. Pour me permettre de le réaliser quelque peu, je me rends bien compte que je suis différent selon les circonstances. Quand je suis avec un de mes amis, je suis différent de ce que je suis avec quelqu’un d’autre. Tout se passe comme si je changeais d’identité selon les circonstances. Je m’installe chaque fois dans l’un ou l’autre de mes reflets potentiels pour actualiser provisoirement un personnage particulier.

 

 

C’est ainsi qu’un mécanisme plus ou moins inconscient me fait actualiser par voie de réaction complémentaire l’un des aspects potentiels de mon identité unique. Mais cet aspect nouvellement actualisé est unique à son tour ; il ne concerne que cette relation (avec une personne particulière, par exemple). Il s’ensuit que toute relation entre deux personnes est obligatoirement unique. Même s’il peut y avoir des ressemblances avec d’autres relations avec d’autres personnes, chaque relation est forcément une configuration unique.

 

Qui plus est, les réactions complémentaires de part et d’autre se sont configurées à partir de l’un ou l’autre des multiples reflets que chacun peut produire. Comme la sélection de tel ou tel aspect de l’autre ne saurait être aléatoire, tout dépend de ce que mon « regard » est disposé à voir à ce moment précis (ceci, bien sûr de façon majoritairement inconsciente). La qualité d’une relation dépend des aspects respectifs qui ont trouvé à se synchroniser. C’est ce qui fait que tantôt nous aimons ou tantôt nous n’aimons pas tel ou tel aspect d’une personne selon les critères individuels qui nous sont familiers. Ceci est un autre sujet que nous ne développerons pas ici ; nous dirons simplement en passant que ces critères sont en majorité liés à des associations d’idées d’ordre psychologique.

 

Les synchronisations ne mettent en résonance (pour le meilleur ou pour le pire) que certains des multiples aspects de chacun, mais il y aurait bien d’autres qui seraient possibles. C’est ce qui fait que dans la mouvance, les synchronisations peuvent se déplacer et changer la nature d’une relation.

 

 

Nous voyons bien, maintenant, la confirmation de ce que les sages de tous les temps ont exprimé de façon diverses, tout n’est qu’illusion. Notre mental « réfléchit » car il manœuvre dans des reflets. Quant à nos pulsions, ce ne sont que réflexes conditionnés fondés sur des peurs illusoires qui résultent d’une sévère myopie intellectuelle. En effet, si l’existence nous apparaît comme le Tout, la mort est un épouvantail ; on comprends dès lors ce système réflexe de défense qu’on appelle l’ego.

 

 

Cependant, si l’erreur masque la réalité, elle ne la supprime pas. Même si à partir de nos différents reflets et de nos diverses personnalités, nous traversons la vie avec des masques (persona en latin = masque), il n’en reste pas moins que notre réalité profonde est toujours là. Même si nous avons du mal à nous connecter à un état de conscience supérieur unifié à l’univers (ou à son Principe divin), à percevoir ce sentiment océanique que les orientaux appellent le « sentiment d’éternité », il n’en reste pas moins que, par nature, il est accessible à tous, ne serait-ce que par bribes intermittentes. La condition humaine se déploie dans l’illusion certes, mais pour celles et ceux qui le savent et ne sombrent pas dans la confusion, c’est aussi grâce à cette configuration que nous pouvons éveiller notre conscience à la splendeur de l’univers.

 

 

Tout est miroir, tout nous renseigne et nous enseigne chaque jour un peu plus. Notre psyché (miroir de l’âme) permet ce prodige. On avance, on trébuche, on se trompe, mais on rectifie et on continue. Bien souvent on tombe sur l’illusion des illusions. C’est lorsqu’on prend un instant d’exception proche du sentiment d’éternité pour une illusion, alors que, justement, il s’agissait d’un moment les plus précieux de notre vie ; un moment de conscience universelle que nous avons ensuite refoulé.

 

 

Tout ce qui appartient a l’illusion est voué à disparaître, à se dissoudre sans trace, tel un éclair. Que peut-il rester de nos vies dans ce qui ne fut qu’illusoire ? Rien évidemment. Par contre, ces instants précieux que nous devrions privilégier, ils s’inscrivent, eux, dans notre réalité universelle. De ce fait ils sont des marches de Connaissance qui éveillent notre « je suis » vers la splendeur du « JE SUIS » universel. Quand notre substance provisoire avec tout les aspects qu’elle permet sert de socle pour en « deviner » notre propre essence, on se conforme à notre fabuleuse « Raison d’être ». Divin et deviner ont la même étymologie, c’est dire que le divin se devine au travers des apparences. Quand c’est l’inverse et que notre substance s’acharne à subsister, on est en conflit avec notre « Raison d’être », un combat perdu d’avance.

 

 

L’Amour est le moyen qui nous est donné pour éveiller notre âme. Tout ce qui est attachement est lié à l’éphémère, il n’en restera rien. C’est l’affect qui est un reflet inférieur et illusoire de l’amour. Par contre, quand l’Amour éveille des phases de total détachement, et par suite de libération (même fugitive) de l’ego, cela s’inscrit au delà du temps et de l’espace dans l’universalité de l’être, dans un éternel présent. Instants impérissables qui ouvrent une brèche définitive dans l’opacité de notre entendement  !

 

 

Quand deux êtres, pour des raisons qui leur échappent, ont rencontré ensemble un espace privilégié où ils ont perçu quelques reflets d’infinitude, c’est qu’ils ont synchronisé des reflets d’ordre supérieur, l’un grâce à l’autre. Chacun a éveillé son regard, le rendant ainsi capable de percevoir les reflets supérieur de l’autre. Par une sorte d’entraînement mutuel, ils se sont élevés ensemble sur une conscience inhabituelle. Une impression de « perdre la tête » qui n’est autre que de perdre le mental et par suite l’ego. Cela n’a peut-être pas duré en raison d’un hostilité du milieu corporel qui perçoit l’universalité comme un néant (ce qui d’ailleurs est logique au niveau de la substance). En effet, on peut saccager l’essentiel et jeter un diamant dans la boue. Cependant, le diamant n’est jamais altéré et donc ils conservent à tout jamais une porte d’accès pour à nouveau accepter de « perdre la tête » et lui substituer « l’intelligence du cœur ». Que ce soit ensemble en retrouvant cet espace privilégié, ce sanctuaire sacré et secret posé dans l’infinitude au creux d’une plume d’ange, ou que ce soit sous d’autres horizons ; un sanctuaire déploie par réfraction de multiples reflets.

 

 

Le fou est censé avoir perdu la tête. Alors, soyons fous !

Le temps presse, il dévore très vite ce qu’il est encore temps de vivre…

 

 

H.Arnaudy 2013